14 Avr

13e volume de l’intégrale Spirou : retour vers le début des années 80

Et voilà le 13e volume de l’intégrale consacrée aux aventures de Spirou et Fantasio. Un 13e volume important puisqu’il marque l’arrivée d’un nouveau tandem, Tome & Janry, à la tête de la série après l’éviction du Breton Jean-Claude Fournier et une période un peu floue pendant laquelle trois équipes d’auteurs furent mises en concurrence. Et dès les premières pages réalisées par Tome & Janry, la presse, les professionnels et le publics furent relativement unanimes pour parler d’une véritable renaissance. Franquin, lui-même, soutenait le duo. C’est dire ! Le premier album à sortir fut Virus. Suivront Aventure en Australie, Qui arrêtera Cyanure ?, trois albums que l’on retrouve aujourd’hui réunis dans cette intégrale. Mais en 1983 apparaît un nouveau personnage qui deviendra quelques années plus tard une très très grande vedette : le Petit Spirou. C’est dans un court récit qu’il apparaît, un court récit paru dans un Hors-série Spirou spécial 45e anniversaire et par la suite publié dans l’album intitulé La Jeunesse de Spirou. Plus qu’une renaissance, c’est une nouvelle ère qui s’ouvre… EGuillaud

Spirou et Fantasio (Intégrale 13), de Tome & Janry. Editions Dupuis. 24 euros

« Terra Australis » : 500 pages pour raconter la naissance de l’Australie, un album de Philippe Nicloux et Laurent-Frédéric Bollée

Les éditions Glénat parlent d’un nouveau « From Hell ». Sans aller jusque là, il faut bien avouer que l’ouvrage impose le respect. 500 pages réalisées au lavis pour raconter la colonisation de ce qu’on appelait à l’époque la Terra Australis Incognita ou Terre australe inconnue, un épisode important de l’histoire, un épisode finalement pas si éloigné de nous, 230 ans à tout casser. Et c’est vrai que, tant au niveau du scénario que du graphisme, l’ouvrage est plutôt pas mal léché. Et de nous entraîner dans les basfonds de Londres, ceux des sans grades, des sans sous, des brigands et des forçats. L’Angleterre croule sous ses prisonniers, la criminalité est en hausse, décision est prise d’en exiler vers l’île continent. Une dizaine de navires, 1000 personnes, des hommes, des femmes et des enfants, 24000 km à parcourir, une véritable armada se met en branle, enmenée par la capitaine Arthur Phillip. Et au bout, pour ceux qui survivront, l’espoir d’une autre vie, peut-être meilleure…

5 ans de travail ont été nécessaires pour réaliser Terra Australis, entre le moment où a germé l’idée dans l’esprit de Laurent-Frédéric Bollée et la livraison de la dernière page à l’éditeur. 5 ans de travail, de fouilles documentaires, de réflexions sur la mise en scène des événements, sur l’apparence des êtres et des choses, sur le découpage, 5 ans de recherches graphiques, de mise en images… et au bout du compte un album riche, très riche, qui a valeur de témoignage sur ce passé pas toujours glorieux et qui nous appartient collectivement. Un énorme boulot et un résultat très digeste, Terra Australis se lit d’une traite. Une magnifique aventure humaine ! Bravo. EGuillaud

Terra Australis, de Bollée et Nicloux. Editions Glénat. 45 euros

10 Avr

« Jacques a dit », un récit BD de Fabien Grolleau et Thierry Bedouet qui se déroule à Nantes

Quelle drôle d’idée ! Voler dans le port de Nantes l’ancien escorteur Maillé-Brézé devenu musée pour aller se recueillir sur la tombe de Jacques Brel aux Marquises. Et cette idée, c’est celle d’un vieux gars de la Marine justement, Jacques, comme le chanteur. Et Jacques est malade. Quelques mois et il aura lui aussi cassé sa pipe. Alors c’est le moment ou jamais. Avec ses potes et le jeune Stéphane, un pauvre gars rencontré sur les quais, Jacques transforme son idée en opération commando. Larguez les amarres et cap vers l’aventure…

Une étrange aventure de fait, imaginée par deux Nantais, Fabien Grolleau et Thierry Bedouet, connus sur la place pour avoir créé la maison d’édition associative Vide Cocagne. Au delà de l’effet sympathique pour les Nantais de retrouver les lieux de leur ville, Jacques a dit est un récit bourré d’humanité, de sensibilité et de poésie subtilement mis en images et en couleurs par un auteur formé aux livres jeunesse. Un album pour tous les gars de la Marine et les autres… EGuillaud

L’interview des auteurs ici

Jacques a dit, de Fabien Grolleau et Thierry Bedouet. Editions Sarbacane. 17,90 euros

06 Avr

75 ans de Spirou : La Galerie des illustres, un ouvrage collectif réunissant Brüno, Cosey, Davodeau, Goossens, Gotlib, Hermann, Rabaté, Schuiten, Vivès, Yoann, Zep…

Enorme ! Enorme par son poids, énorme aussi par le nombre d’auteurs réunis dans ses pages. 200 au total ! Et pas des moindres, non, tous ceux ou presque qui comptent dans la bande dessinée franco-belge sont ici. Visez plutôt : Baru, Baudoin, Berthet, Blutch, Boucq, Brüno, Cosey, Cabu, David B, Davodeau, Dupuy & Berberian, Le Gall… reprenez votre souffle… Dodier, Goossens, Gotlib, Le Gall, Lepage, Loustal, Margerin, Pedrosa, Pétillon, Schuiten… une galerie d’auteurs plus illustres les uns que les autres réunis pour rendre hommage à l’univers de Spirou en cette année marquée par le soixante-quinzième anniversaire du personnage et du journal. 2013, année groom !

200 auteurs donc qui ont réalisé dans leur propre style une planche mettant en scène leur enfance, leur rencontre avec la BD et plus particulièrement avec le journal Spirou. On s’amuse de voir un Gaston Lagaffe prenant vie sous la plume de Florence Cestac, un Fantasio sous celle de Ted Benoît, on s’émerveille devant ce bolide ressuscité des premières aventures de Spirou et Fantasio par Christophe Blain, ce Marsupilami géant imaginé par Nicolas de Crécy, cette histoire délirante de Lucky Luke écrite par Gotlib ou encore ce récit autobiographique de Zep mettant en scène ses déboires de débutant avec les éditions… Dupuis.

Mais là où l’ouvrage frôle le génie, oui oui absolument, c’est quand il nous propose en regard de chaque planche-hommage une courte interview de l’auteur signataire. Et on y apprend beaucoup de choses, souvent très intimes…  Beau boulot ! EGuillaud

La Galerie des illustres, collectif. Editions Dupuis. 45 euros

España la vida, un album de Vaccaro et Le Roy chez Casterman

La guerre civile espagnole connaîtrait-elle un regain d’intérêt ? En l’espace de quelques semaines sont apparus sur les étagères de nos librairies spécialisées Le Convoi, un dyptique signé Torrents et Lapière portant sur la « retirada », l’exode des Républicains vers la France à partir de décembre 1938, et España la Vida, un récit de Vaccaro et Le Roy qui nous ramène quelques mois auparavant, au moment du bombardement de Guernica. Jean-Léonard, Léo pour les intimes, jeune Parisien issu de la bonne bourgeoisie ne supporte plus de regarder l’Espagne sombrer et tomber aux mains des Franquistes. Bien décidé à défendre ses idéaux libertaires, Léo finit par rejoindre les Brigades internationales où il se frotte très rapidement à la dure réalité de la guerre…

A la différence du Convoi, clairement inspiré de faits réels ayant touché la famille d’un des auteurs, España la vida est cette fois une pure fiction. « J’avais envie d’essayer un autre type d’écriture… », explique le scénariste Maximilien Le Roy, familier d’une bande dessinée plus documentaire. « Le travail de reportage ne laisse, et pour cause, pas la moindre place à l’imagination : il faut être au plus près des témoignages que l’on recueille. Une fiction nécessite un autre type de travail sur la narration. Celà dit, j’ai tenu à écrire une fiction qui soit très ancrée dans les réalités historiques et politiques de l’époque ». Maximilien Le Roy au scénario, Eddy Vaccaro au dessin et Anne-Claire Thibaut-Jouvray aux couleurs : le trio nous offre ici un récit sur l’engagement individuel en même temps qu’une belle histoire d’amour. Un récit plein d’humanité dans un monde en guerre ! EGuillaud

España la vida, de Vaccaro, Le Roy et Thibaut Jouvray. Editions Casterman. 25 euros

03 Avr

Fred, le créateur de Philémon, est décédé mardi soir…

Frédéric Othon Théodore Aristidès, alias Fred, est décédé hier à l’âge de 82 ans laissant orphelin quantité de fans mais aussi son personnage Philémon créé au début des années 70 pour le journal Pilote et qui connut une ultime aventure en février de cette année avec l’album Le Train où vont les choses.
Fred était aussi l’auteur des albums Magic Palace Hôtel, Le Fond de l’air est frais, Le Petit cirque, Manège, L’Histoire de la dernière image
Grand Prix de la ville d’Angoulême en 1980, Alph’Art du meilleur album en 1994… Fred fait partie des géants du Neuvième art, un poète qui a développé un univers onirique sans pareil !

En janvier 2012, une équipe de reportage de France 3 Poitou-Charentes rencontrait l’auteur alors en plein travail sur son dernier album…

01 Avr

Le Convoi, une histoire de la guerre d’Espagne signée Torrents et Lapière

Montpellier, un jour de novembre 1975. Angelita reçoit un appel de son beau père. Sa mère a fait une crise cardiaque et est hospitalisée à Barcelone. Alors que tout le monde la croyait en Auvergne ! Pourquoi Barcelone, elle qui s’était jurée de ne plus mettre les pieds en Espagne tant que Franco serait vivant. Mystère. Angelita est une fille de réfugiés espagnols arrivée en France en 1939. Sa mère et elle ont depuis refait leur vie, son père est mort en déportation, du moins le pensait-elle jusqu’à ce jour…

Inspiré par des faits réels dont certains auraient touché la famille du dessinateur Eduard Torrents, Le Convoi nous plonge au coeur des années noires, depuis la guerre civile espagnole jusqu’à la Seconde guerre mondiale en passant par ce qu’on appelle la « retirada », l’exode de 500 000 républicains espagnols vers le territoire français à compter de décembre 1938, des réfugiés entassés dans des camps souvent improvisés avant pour certains d’être déportés dans les camps de concentration nazis. Dans ce contexte fort et douloureux, Eduard Torrents et Denis Lapière développent une très belle histoire de famille en deux volumes. EGuillaud

Le Convoi (2 tomes), de Torrents et Lapière. Editions Dupuis. 15,50 euros le volume

27 Mar

75 ans de Spirou : la fête continue avec la parution de l’album de Nicoby et Joub, « Dans l’atelier de Fournier »

L’année groom se poursuit ! Après la publication de la 53e aventure de Spirou et Fantasio, du premier volet de La Véritable histoire de Spirou et de Spirou par Rob-Vel, voici Dans l’atelier de Fournier, un album qui explore le parcours artistique de Jean-Claude Fournier. Mais qui est ce Jean-Claude Fournier ne manqueront pas de s’interroger les plus jeunes d’entre-vous ? Un Breton ! Et surtout l’un des 22 auteurs ayant travaillé sur les aventures de Spirou et Fantasio. Dans l’ordre chronologique, Jean-Claude Fournier arrive juste après Franquin et avant Nic et Broca. Nous sommes dans les années 70, l’auteur apporte sa griffe à la série avec des récits teintés d’écologie, de fantastique et de poésie… A cette époque, son personnage de L’Ankou devient même l’emblème de la lutte contre le projet de centrale nucléaire à Plogoff. Mais Jean-Claude Fournier, c’est aussi Bizu, Les Crannibales et plus récemment Les Chevaux du vent.

Réalisé sous la forme d’une rencontre en bande dessinée, Dans l’atelier de Fournier dresse le portrait de cet homme avec beaucoup d’humour et quantité de documents à l’appui, des documents d’archives souvent inédits, des planches, des croquis, intégrés dans le récit lui-même ou réunis en fin d’album. Aux manettes, les deux Bretons Joub (Geronimo, Max et Zoé…) et Nicoby (20 ans ferme, Excursion coréenne…) ont visiblement pris un plaisir immense à réaliser ce travail qui mine de rien nous permet de redécouvrir un auteur talentueux et humain passé par des hauts et des bas, la gloire et la déprime, mais qui a su se renouveler et nous surprendre encore récemment. Et dire que le grand Franquin lui avait déconseillé de reprendre les aventures de Spirou et Fantasio… Passionnant ! EGuillaud

Dans l’atelier de Fournier, de Joub et Nicoby. Editions Dupuis. 24 euros

26 Mar

Interview des auteurs de la BD documentaire « Plogoff » parue chez Delcourt : Delphine Le Lay et Alexis Horellou

Plogoff, c’est l’histoire d’un projet de centrale nucléaire, c’est aussi et surtout l’histoire d’un combat acharné mené par une belle poignée d’irréductibles gaulois contre le rouleau compresseur de l’Etat. Une histoire qui finit bien pour les irréductibles, un peu moins pour les pro-nucléaires. Une histoire qui nous en rappelle une autre, beaucoup plus proche de nous dans l’espace géographique et l’espace temps : le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Les auteurs, Delphine Le Lay et Alexis Horellou, aujourd’hui installés dans le petit village de Niafles en Mayenne, ont accepté de répondre à nos questions…

La suite ici…

24 Mar

Après-guerre, le nouveau récit de Warnauts et Raives au Lombard

1947, un petit village des Ardennes belges. La guerre a beau être terminée depuis deux ans maintenant, la vie quotidienne de chacun est encore profondément marquée par celle-ci. Le marché noir est un sport national, la débrouille une obligation, les ruines dans les grandes villes d’Europe une réalité, les tensions est-ouest une nouvelle donne. C’est dans ce contexte que Thomas, jeune bourlingueur, apprend que sa compagne, son amour, l’Espagnole Assunta, est enfermée dans un camp russe, de l’autre côté de ce que Winston Churchill appelle dès 1946 le rideau de fer. Dès lors, Thomas n’aura de cesse de tout mettre en oeuvre pour l’exfiltrer…

Après Les Temps nouveaux qui débutait à la fin des années 30 avec l’explosion du Rexisme (mouvement d’extrême droite belge), Warnauts et Raives poursuivent leur récit avec un nouveau diptyque qui nous plonge cette fois dans le contexte de l’après-guerre et du début de la guerre froide. On retrouve bien évidemment les personnages principaux, le frère rexiste de Thomas en moins, tué dans un guet-apens. Car c’est ça aussi la touche Warnauts-Raives : partir d’un contexte historique fort pour raconter les petites histoires du commun des mortels, des morceaux de vie, de survie, d’amour, de passion et de déchirements. Graphiquement, comme toujours,  le trait réaliste et les couleurs directes, fruits d’un travail à quatre mains, font immédiatement sensation. Une chronique subtile et documentée.  EGuillaud

Après-guerre, de Warnauts et Raives. Editions Le Lombard. 14,99 euros