11 Nov

L’Amour et la vermine : un recueil de dessins publiés dans le New Yorker signés Will McPhail

Il ne lui aura fallu qu’un seul livre pour s’imposer dans le vaste monde du neuvième art. Au-dedans, paru en janvier 2024, a été unanimement salué par la critique comme par le public, raflant au passage plusieurs distinctions prestigieuses, dont le Prix BD Fnac France Inter 2025. Will McPhail revient aujourd’hui avec L’Amour et la Vermine, un recueil d’illustrations publiées dans The New Yorker. Rien de moins que la confirmation d’un talent singulier.

Lorsque son premier album a débarqué dans nos librairies préférées en janvier 2024, il faut bien avouer qu’on ne connaissait pas grand-chose du bonhomme, si ce n’est qu’il œuvrait depuis plusieurs années pour le prestigieux New Yorker.

Mais peu importait l’homme : ce qui comptait sur le moment, c’était son livre, Au-dedans, qui, rien que par son titre et sa couverture, éveillait déjà notre curiosité.
Mais que pouvait bien raconter Au-dedans ? Une aventure intérieure — ou plus précisément, une aventure vers l’intérieur. La petite porte dessinée sur la couverture ouvrait la voie à cet espace intime. Et tout au long de l’ouvrage, une question revenait, obsédante : comment relier les intérieurs entre eux ? Autrement dit, comment connecter les êtres humains les uns aux autres ?

© 404 Graphic / Will McPhail

Avec Au-dedans, l’année 2024 démarrait fort pour tous les amoureux du neuvième art et pour Will McPhail surtout, qui allait récolter les éloges de la presse, du public et des professionnels de la bande dessinée. Plusieurs milliers d’exemplaires vendus et une poignée de récompenses plus tard, l’auteur anglais revient avec une nouvelle pépite, L’Amour et la Vermine, un recueil rassemblant quelque 250 de ses illustrations parues dans The New Yorker.

On y retrouve ce style qui nous avait séduits dès les premières pages d’Au-dedans : un trait réaliste d’une grande précision, des personnages aux yeux écarquillés, un dessin épuré, un humour d’une finesse rare, un sens aigu de l’observation et un regard d’une lucidité saisissante sur notre monde.

Eric Guillaud

L’Amour et la vermine, de Will McPhail. 404 Graphic. 35€

© 404 Graphic / Will McPhail

07 Nov

« Je cherchais le fils et j’ai trouvé le père » : le scénariste Philippe Pelaez accompagné de Bernard Khattou au dessin remonte aux origines des Kennedy

Sur près de 500 pages, Philippe Pelaez et Bernard Khattou remontent le fil d’une destinée hors norme, celle d’une famille dont les rêves de gloire se sont souvent heurtés à la fatalité. Kennedy(s), une épopée graphique où l’Histoire croise la légende.

« Je cherchais le fils et j’ai trouvé le père » : ainsi débute la postface de Philippe Pelaez en ouverture d’un dossier très complet accompagnant le récit en bande dessinée. Il cherchait le fils, John Fitzgerald Kennedy, pour en raconter l’ascension et la fin tragique que nous connaissons tous, son assassinat à Dallas en 1963.

Mais en rassemblant sa documentation, le scénariste a vu émerger une autre figure tout aussi incontournable, celle du père, Patrick Joseph Kennedy. Un homme né sur le sol américain de parents irlandais ayant fui la famine qui ravageait leur pays, et qui allait, par son ambition démesurée, jeter les bases d’une dynastie aussi puissante que tourmentée.

© Glénat / Pelaez & Khattou

Sur près de 500 pages en noir et blanc, Kennedy(s) — avec ce s qui souligne d’emblée la dimension plurielle du récit — retrace l’histoire d’une famille hors norme, entre réussites éclatantes et tragédies successives.

L’histoire commence quelque part sur les quais de Boston en 1849 avec l’arrivée en Amérique de Patrick Joseph Kennedy et s’étend jusque dans les années 1960 avec la mort du petit-fils, président des États-Unis, John Fitzgerald Kennedy, assassiné lors d’un déplacement à Boston, un siècle d’une histoire familiale qui a toujours flirté avec la mort, un siècle de l’histoire d’une nation et au-delà un siècle de l’histoire du monde contemporain. 

© Glénat / Pelaez & Khattou

S’appuyant sur une documentation phénoménale, dont témoigne l’imposante bibliographie en fin d’ouvrage, Philippe Pelaez cherche à éclairer l’origine du mythe Kennedy, précisément là où se nichent sans doute les explications de la tragédie de Dallas. Graphiquement, Bernard Khattou, dont on a déjà pu mesurer le talent dans Bikini Atoll ou Sunlight, enchaine les pages avec un trait réaliste alliant précision et sens du détail, embarquant littéralement le lecteur au cœur de l’histoire.

Eric Guillaud

Kennedy(s), de Pelaez et Khattou. Glénat. 38€

Lucky Luke, une figure iconique de la BD remise en selle par Brüno et Appollo

Près de quatre-vingts ans après sa création, Lucky Luke continue de faire rêver et d’inspirer. Le dessinateur nantais Brüno et le scénariste réunionnais Appollo revisitent le mythe du cow-boy solitaire dans Dakota 1880, un hommage à la fois respectueux et audacieux au héros de Morris et Goscinny. Rencontre…

© Photo : France 3 Pays de la Loire / Eric Guillaud – Illustration : Dargaud / Lucky Comics

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29 Oct

Utopiales 2025 : dix-huit BD SF pour se faire une idée du futur

Le Festival international de science-fiction se tient à Nantes du jeudi 30 octobre au dimanche 2 novembre. Des centaines de chercheurs et d’auteurs, ainsi que des milliers de visiteurs, sont attendus pour débattre, imaginer et penser l’avenir autour du thème « Singularités ». Histoire de se mettre la tête dans les étoiles, voici une sélection de bandes dessinées de science-fiction parues cette année, certaines d’entre elles étant d’ailleurs en lice pour le Prix Utopiales BD 2025

On commence avec le quatrième volet de Bug d’Enki Bilal, qui nous plonge dans un futur proche où tout a disparu : les réseaux sociaux, les disques durs du plus gigantesque serveur à la plus minuscule clé USB, les données, les archives, toute la mémoire du monde. Nous sommes en présence d’un Bug Numérique Généralisé. Conséquence directe et immédiate, l’humanité est dans la merde!

Dans ce chaos, un homme émerge, Kameron Obb, cosmonaute et unique survivant d’une mission sur Mars. Il revient sur Terre avec un alien en lui, un espèce de bug extraterrestre qui s’est posé sur ses cervicales. Et surtout, l’homme souffre d’une hypermnésie singulière, comme si toutes les données numériques, toute la mémoire du monde avaient migré dans son cerveau. C’est Internet à lui tout seul !  Autant dire qu’il devient l’objet de toutes les convoitises, le monde entier le réclame et certains par des moyens radicaux. (Bug tome 4/5, de Bilal. Casterman. 20€)

Abara, Blame 0, Biomega... Tsutomu Nihei s’est fait connaître au Japon et en Europe avec des récits SF sombres, désespérés, violents, oppressants, organiques, reconnaissables entre tous et récemment réédités dans une version Deluxe aux éditions Glénat. Il revient aujourd’hui avec un récit de fantasy, Tower Dungeon, graphiquement un peu moins torturé mais toujours aussi percutant et efficace. Au cœur de l’histoire, une princesse, enlevée par un nécromancien maléfique et enfermée dans la tour des dragons. Pour la libérer, la garde royale va devoir affronter quelques délicieux monstres. Le second volet vient de sortir. (Tower Dungeon, tome 2, de Tsutomu Nihei. Glénat. 7,90€)

Depuis 2011 et son premier album, La Belle Mort, Mathieu Bablet ne cesse de nous surprendre — pour ne pas dire de nous émerveiller — bâtissant, trait après trait, page après page, un univers d’une richesse exceptionnelle, où la précision du dessin rivalise avec la profondeur du propos. Après Shangri-La (2016) et Carbone & Silicium (2020), l’auteur poursuit son exploration des mondes futurs avec Silent Jenny, un impressionnant roman graphique de près de 300 pages, dont chacune force le respect.

Dans ce nouveau récit, les abeilles ont disparu, emportant avec elles toute possibilité de pollinisation, et donc de survie pour une grande partie du vivant. L’humanité vacille, mais parvient à se réorganiser et à subsister au sein de monades, d’étranges habitats collectifs, mobiles et brinquebalants. C’est dans ce monde en sursis que Jenny, une jeune scientifique, parcourt les coins et recoins de la planète à la recherche des dernières traces d’ADN d’abeilles, dans l’espoir de les cloner et, peut-être, de reconstruire le monde d’avant.

S’il se dit inspiré par la science-fiction des années 70 et notamment par les productions publiées dans Metal Hurlant, Mathieu Bablet fait preuve d’une maîtrise narrative et graphique impressionnante, élaborant un univers bien à lui, foisonnant de détails. (Silent Jenny, de Mathieu Bablet. Label 619. 31,90€)

En trois albums seulement, Philippe Valette s’est imposé comme un nom incontournable de l’humour. Mais fini de rire : après Georges Clooney et Jean Doux et le mystère de la disquette molle (Fauve Polar SNCF 2018), l’auteur signe en 2025 L’Héritage fossile, un récit de science-fiction au ton grave et à la mise en scène cinématographique. Le thème : les limites de la civilisation face à l’immensité du cosmos.

Le résultat est bluffant. Scénario limpide, dialogues percutants, découpage ultra-efficace, graphisme inspiré de l’animation : tout concourt à une lecture immersive.

Le récit s’inscrit dans la lignée de la SF dite classique tendance « conquête de l’espace » : un équipage, conduit par le milliardaire Reiz Iger, part coloniser Geminæ, planète idéale située à 19 999 années de la Terre. En biostase, les voyageurs se réveillent tous les 25 ans pour entretenir leur vaisseau, l’Héritage. Mais le contact avec la Terre se rompt, et un mal étrange ronge leurs corps. Entre la survie de la civilisation et leur propre survie, les astronautes vont devoir faire un choix douloureux…

Valette interroge ici notre rapport au progrès, à la survie et à la finitude, tout en livrant une aventure haletante, influencée par 2001, l’Odyssée de l’espace, L’Armée des 12 singes, Spin ou Silo.

Un récit puissant, visuellement éblouissant, et un superbe objet de lecture. (L’Héritage fossile, de Philippe Valette. Delcourt. 34,95€)

Qu’il neige l’hiver à Montréal, rien de plus normal. Le contraire serait même inquiétant. Mais autant de neige ? Et un hiver aussi long ? Au point que des quartiers entiers de la ville se retrouvent ensevelis ? La faute à l’accident survenu dans la centrale nucléaire de Gentilly 3. Depuis, la principale ville du Québec vit un hiver nucléaire. De quoi donner envie de rester au chaud sous la couette. Mais pas question pour Flavie : la jeune fille doit assurer ses livraisons en motoneige, braver le froid, les tempêtes et les mutants qui rôdent dans la ville pour apporter les commandes à des clients pas toujours très sympathiques. Et tant pis si elle-même a été irradiée et développe depuis un super-pouvoir à la Hulk.

Publié initialement en trois volumes de l’autre côté de l’Atlantique, Hiver nucléaire nous arrive aujourd’hui sous la forme d’une intégrale : 260 pages d’un récit d’anticipation qui préfère l’humour à la violence, la dérision à la noirceur. Le tout est porté par un dessin au style un brin naïf mais profondément attachant, à l’image de son héroïne. (Hiver nucléaire, de Cab. Steinkis – Aux Confins. 24€)

2070, quelque part en France. Camille et Gloria auraient pu vieillir tranquillement l’un à côté de l’autre, prenant soin l’un de l’autre, comme beaucoup de retraités ! Mais une révolution médicale est passée par là, bouleversant le quotidien du couple et de nombreux autres. Cette révolution a pour nom Le Prolongement et permet de repousser les limites de la vieillesse. Si Camille est resté totalement insensible à cette promesse d’éternité, ce n’est pas le cas de Gloria qui, depuis des années, passe son temps allongée dans un caisson éterniseur installé dans la cave de la maison.  Jusqu’au jour où ce fameux éterniseur tombe en panne…

Ne plus vieillir ! Et si l’un des plus vieux rêves de l’humanité devenait une réalité ou, du moins, une possibilité pour quelques-uns d’entre nous ? Dans sa première bande dessinée, Gwendal Le Bec explore avec finesse et légèreté les thématiques du temps qui passe, de l’amour et de la mortalité… Avec cette question : à quoi bon décrocher l’éternité quand vos proches n’en veulent pour rien au monde ? Une fiction d’anticipation au style léger, drôle et sensible. (Le Prolongement, de Gwendal le Bec. Casterman. 25€)

Série culte de la SF francophone, Aquablue revient en 2025 avec deux nouveaux albums signés Fred Duval (scénario) et Stéphane Louis (dessin). Trente-sept ans après sa création par Thierry Cailleteau et Olivier Vatine, la saga écologique et humaniste n’a rien perdu de sa force.

On y retrouve Nao, toujours au cœur du récit, confronté cette fois à la mort mystérieuse des Uruk Uru, créatures marines vénérées d’Aquablue. Pour élucider le mystère et renouer avec son fils Ylo, il devra braver l’interdiction de retourner sur sa planète natale.

Action, humour et engagement écologique demeurent les piliers de cette série visionnaire. Côté graphisme, Stéphane Louis s’en sort très bien avec un dessin qui ne joue pas l’esbroufe mais vise l’essentiel, l’efficacité avant tout, les couleurs de Véra Daviet faisant le reste du boulot. Du divertissement avec un D majuscule ! (L’Oeuf de Lochshore, Aquablue tome 20, de Duval, Louis, et Daviet. Delcourt. 15,50€)

Si vous aimez les mutants et les créatures mécaniques, vous allez être servi avec cette première œuvre de Chang Sheng (également auteur de Yan), une trilogie dont le troisième tome vient de sortir. Au cœur du récit, on suit Elisa, l’une des rares humaines rescapées de l’apocalypse, qui survit dans un Taïwan en fin de vie, aux rues délabrées, et envahi par un parasite inconnu, Baby, qui transforme les êtres humains en monstres mécaniques. L’humanité est proche de l’extinction. Elisa, elle-même, est attaquée par un mutant. Un Baby réussit à s’introduire dans sa main gauche, mais elle échappe à la mort et compte bien trouver l’origine de ce parasite. Un univers futuriste des plus noirs, une héroïne attachante et forte de caractère, un graphisme limpide et dynamique… une très belle série. (Baby tome 3, de Chang Sheng. Glénat. 14,95€)

Les forêts verdoyantes ne sont plus qu’un vague souvenir, l’air doit dorénavant être filtré, la mer est définitivement empoisonnée. Bref, la Terre n’est plus qu’une planète morte qu’il devient urgent de quitter. Mais pour aller où ? C’est à cette question que Léla, astronaute à bord du télescope Ulysse, pourra peut-être répondre un jour. Nous sommes le 22 octobre 2283 quelque part dans l’immensité de l’espace, la jeune femme entame sa 784ᵉ journée de mission en dictant son rapport à l’ordinateur central. Même si la solitude commence à lui peser, et son amie à lui manquer, Léla n’oublie pas qu’elle était volontaire pour cette mission. Elle assume mais ça risque d’être un long, un très long voyage.

Premier album de l’Italien Gabriele Melegari, Au-delà de Neptune est un récit de science-fiction dans la veine de 2001, l’Odyssée de l’espace, né d’une photographie emblématique, celle du premier trou noir prise par le télescope Event Horizon et rendue publique en 2019. Graphiquement, l’auteur a privilégié l’usage de la gouache, ce qui apporte une belle profondeur à ce voyage spatial et de splendides illustrations de l’univers. Un récit onirique, intimiste et poétique. (Au-delà de Neptune, de Gabrielle Melegari. Steinkis – Aux Confins. 24€)

« Dans la vie, il n’y a pas de personnages principaux ni secondaires. » Tout est dit. Dans Les Météores, pas de héros, seulement des êtres ordinaires — Floyd, Hollie, Don, Gary, Charlie, Elijah — occupés à vivre, ou plutôt à survivre. Même lorsqu’une météorite menace d’anéantir la planète, personne ne s’affole : chacun continue sa route, résigné, humain.

Après Empire Falls Building, Deveney et Redolfi quittent la verticalité du gratte-ciel pour une horizontalité apaisée, servie par un format à l’italienne et un découpage presque cinématographique. Le trait léger, les teintes hivernales et la lumière douce accompagnent à merveille ce récit fragmenté, poétique et suspendu. Un album intimiste, universel, d’une délicatesse rare. (Les Météores – Histoires de ceux qui ne font que passer, de Jean-Christophe Deveney et Tommy Redolfi. Delcourt. 34,95€)

La couverture annonce la couleur, la couleur et la teneur : un monde en fin de course baigné dans une lumière à dominante jaune et orange. Et dans ce monde-là, Géo, éboueur de l’espace, échoué là à la suite d’une panne de son vaisseau-benne, erre au milieu des vestiges d’une société disparue. La Terre n’est plus qu’une immense décharge et l’humanité a trouvé refuge sur une planète artificielle en forme de méduse, les plus fortunés habitant la cloche, le dôme, les autres étant relégués dans les tentacules, vastes salles des machines faites d’une multitude d’ascenseurs, de tunnels et de passerelles. Seul sur la Terre, Géo tombe sur un exemplaire de La Tempête de Shakespeare, un livre qui pourrait bien le guider dans cet environnement hostile…

Artiste protéiforme, illustrateur, designer, auteur de comics expérimentaux, le Néerlandais Viktor Hachmang nous invite ici à une immersion vertigineuse dans un univers où l’humanité a finalement détruit son propre foyer. Un imaginaire profondément personnel, un style graphique nourri par les plus belles années du magazine Metal Hurlant et une palette de couleurs audacieuse font de la lecture de L’Arpenteur une véritable expérience graphique et scénaristique. (L’Arpenteur, de Viktor Hachmang. Casterman. 20€)

Didier Tarquin. Ce nom vous dit forcément quelque chose. C’est le dessinateur de l’une des séries phares de l’heroic fantasy en BD, Lanfeust de Troy. Il revient en auteur complet cette fois sur une aventure de SF dont le premier volet est sorti au début de l’année 2019. U.C.C. Dolores, c’est son nom, a tout du western intergalactique et peut-être déjà tout d’un classique du genre. « Quand on parle de western en bande dessinée… », explique l’auteur, « il y a une œuvre qui vient immédiatement à l’esprit. Une et une seule : Blueberry. Avec, évidemment, la patte de Giraud. J’avais envie de retrouver ça, de faire quelque chose de très classique – de néo-classique, disons. Une BD moulée à la louche et au pinceau, c’était comme un besoin de revenir aux fondamentaux quelque part ».  Inutile de vous dire que le résultat est graphiquement sublime. Quant à l’histoire, celle d’une orpheline élevée dans un couvent qui se retrouve du jour au lendemain propriétaire d’un croiseur de guerre baptisé U.C.C. Dolores, on ne peut qu’être conquis. Le septième volet qui clôt le cycle des Sables de Tishala vient de sortir ! (Les ombres d’Okotsha, U.C.C. Dolores tome 7, de Didier Tarquin et Lyse Tarquin. Glénat. 13,90€)

On fait un bond dans le temps pour se retrouver 500 ans après le grand effondrement. La planète Terre n’est plus qu’un immense champ de ruines rongées par des pluies acides. La faute à qui ? La faute aux hommes bien sûr qui ont précipité la fin de l’humanité en s’entêtant pendant des années dans un projet de folie : installer un générateur d’énergie propre sur la Lune pour alimenter les infrastructures terriennes destinées à dépolluer l’atmosphère et les océans. Et ce générateur d’énergie propre n’est ni plus moins qu’une forêt. Une immense forêt…

Ce premier volet d’une trilogie dont on devrait voir le bout en 2026 selon l’éditeur, donc, avec un peu de chance, avant le grand effondrement prévisible de l’humanité, joue habilement sur les contrastes. Le dessin, à la fois imaginatif, moderne et très coloré, adoucit un récit apocalyptique d’une grande noirceur, même si quelques spécimens sont encore là pour témoigner et tenter de changer la fin de l’histoire. À méditer ! (L’Ascenseur, Avaler la Lune tome 1, de Castel, Cousin et Jarry. Casterman. 20€)

De quoi sera fait demain ? Les livres seront-ils encore écrits par des humains ? Les intelligences artificielles remplaceront-elles éditeurs et boulangers ? Et qui peuplera les premières colonies interplanétaires ? Autant de questions – parmi bien d’autres – explorées dans cet ouvrage collectif réunissant Jean-Christophe Chauzy, Christian de Metter, Aurélien Ducoudray, Guillaume Dorison ou encore Jean-Michel Ponzio.

Chacun, avec son style, imagine en quelques pages un futur proche et crédible, nourri des mutations déjà à l’œuvre : intelligence artificielle, emprise des réseaux sociaux, dérèglement climatique, conquête spatiale… Des visions multiples, parfois inquiétantes, mais toujours révélatrices d’un monde dans lequel la fiction rattrape peu à peu la réalité. (2050, collectif. Philéas. 19,90€)

Ils nous avaient emmenés dans un monde à la Jules Verne avec Le Voyage extraordinaire, Silvio Camboni et Denis-Pierre Filippi sont de retour avec Prima Spatia, de la SF de haut vol mettant en scène une jeune fille de 17 ans, Alba, cloitrée pour sa sécurité sur un astéroïde privé, loin de tout, loin de ses parents, jusqu’au jour où elle est enlevée et se retrouve, elle et sa gouvernante, à errer pendant des mois à travers l’espace avant d’être finalement recueillie à bord de La Flèche, un navire cosmique conçu pour chasser les créatures stellaires…

Dès les premières pages du volet d’ouverture, le ton était donné, Prima Spatia faisait dans la grande aventure intergalactique tendance space opera avec un dessin, des couleurs, une galerie de personnages, de toute beauté et un scénario relativement classique mais malin, glissant ici et là quelques problématiques contemporaines. Une histoire en trois volets. (Prima Spatia, de Filippi et Camboni. Vents d’Ouest. 14,95€)

2779, quelque part dans l’espace confédéré. La jeune fugueuse Kristina parvient à rejoindre clandestinement la planète Drenn grâce au cartel des Cimes pour qui elle est censée travailler un mois. C’est le prix à payer pour ce voyage. Mais une fois sur place, les quatre semaines se sont transformées en six mois. Et la brutalité du Cartel ne laisse aucune marge de manœuvre. Alors, Kristina courbe l’échine un temps avant de se redresser, de gravir les échelons des mafias extraterrestres et d’en devenir la reine…

Spin off d’Orbital, une série de Runberg et Pellé,Outlaws nous embarque dans le monde des mafias galactiques en compagnie de la sœur de Caleb, héros d’Orbital. Le troisième volet vient de paraître ! (Prémisses, Outlaws (tome 3), de Runberg et Chabbert. Dupuis. 15,50€)

On le sait, l’auteur belge Hermann est un véritable métronome, livrant presque chaque année une nouvelle aventure de Jeremiah et ce depuis la création de la série en 1979. Quarante-deux albums en quarante-six ans d’existence, Jeremiah fait partie des séries phares de l’histoire du neuvième art, même si toutes les péripéties du célèbre tandem formé par Kurdy et notre héros éponyme ne se valent pas forcément. Et cette fois encore, la livraison annuelle ne se révèle pas totalement indispensable même si l’on retrouve ces décors et paysages qui nous ont fait défaut dans les deux épisodes précédents, noyés dans un épais brouillard. Dans cette nouvelle aventure, Jeremiah s’est fait embaucher comme serveur au Lilly Palace histoire de se refaire une santé financière. Mais bien évidemment, rien ne va se passer comme prévu dans cet univers post-apocalyptique et crépusculaire où se bousculent les psychopathes les plus dangereux. (Les Larbins, Jeremiah tome 42, de Hermann. Dupuis.13,50€)

On termine avec une collection lancée en mars 2024. Huit tomes sont prévus, six sont d’ores et déjà disponibles. Véritable voyage d’étude à travers le système solaire, chaque album est consacré à une planète et mêle fiction et savoir scientifique, grâce à la participation active de chercheurs de l’Observatoire de Paris – PSL.

On termine avec une collection lancée en mars 2024 qui se présente comme un véritable voyage d’étude à travers le système solaire. Huit albums sont prévus, six sont d’ores et déjà disponibles. Chacun d’eux est consacré à une planète et propose une fiction permettant d’aborder la science de façon sérieuse grâce à la participation active de scientifiques experts à l’Observatoire de Paris – PSL.

Quel est le diamètre de la planète rouge ? Peut-on trouver de l’eau à sa surface ? Quelle est la structure interne de Jupiter ? Quels sont ses satellites ? De quoi est constituée l’atmosphère de Vénus. Autant de questions et plus encore qui trouvent réponses ici, à la fois dans la fiction et dans le dossier qui conclut chaque aventure. Et si vous souhaitez vraiment prendre de la distance avec la Terre et ses satanés Terriens sans vous ruiner, je vous conseille vivement cette collection… (Vénus, la fournaise acide, Système solaire tome 6, de Lecigne, Khaled et Dujardin. Glénat / Observatoire de Paris PSL. 16€)

Eric Guillaud 

26 Oct

Michel Vaillant toujours en pole position

Né de l’imagination de Jean Graton en 1957, le légendaire Michel Vaillant a vécu mille et une aventures sur les circuits du monde entier. Et ce n’est pas fini : près de soixante-dix ans plus tard, notre pilote préféré continue de tracer sa route…

Si la première saison, avec ses 70 albums et plus de 20 millions d’exemplaires écoulés dans le monde, a bâti la légende de Michel Vaillant, la deuxième s’est imposée dès la première aventure comme un renouveau : respectueuse de l’héritage de Jean Graton et de sa galerie de personnages, mais résolument tournée vers la modernité, dans la forme comme dans le ton.

Bingo ! Michel Vaillant repartait pour une seconde vie. Nous étions en 2012. Treize ans et quatorze albums plus tard, notre héros intergénérationnel est toujours en course.

Dernier album en date, Remparts nous emmène pour Angoulême, sur le mythique circuit des remparts, pour une course de voitures historiques. C’est là que l’entreprise Vaillante a décidé de dévoiler au public son nouveau modèle révolutionnaire. Mais alors qu’elle traverse déjà une situation financière délicate qui pourrait l’éloigner un temps de la compétition, la firme se voit dérober sa voiture d’exposition et kidnapper son célèbre pilote. (Remparts, Michel Vaillant Saison 2, de Lapière, Bourgne et Eillam. Graton. 16,95€)

Si tout le monde connaît Michel Vaillant, ne serait-ce que de nom, beaucoup moins savent qui est Henri Vaillant, son père, une figure de second plan dans la série, mais un pilier de l’univers. Car sans lui, pas de Vaillante, pas de Michel, pas de légende ! Dans cet album, Marc Bourgne au scénario et Claudio Stassi au dessin retracent le parcours de vie d’Henri Vaillant, son embauche chez Bugatti, sa rencontre avec Elisabeth qui deviendra sa femme, les premiers tours de roues de la Vaillante au Mans, la création de la firme Vaillante, l’entrée en guerre en 1939, son action dans la Résistance, la Libération, la compétition… et les débuts d’un certain Michel Vaillant au volant d’une Vaillante. Un album destiné aux fans de la série mais pas seulement, Henri Vaillant remonte le temps en mode fiction pour nous faire revivre le monde automobile du XXᵉ siècle. Une fresque vibrante qui raconte la naissance d’une légende. (Henri Vaillant, Une vie de défis, de Bourgne et Stassi. Graton. 25€)

Le personnage de Michel Vaillant fait son apparition en 1957 dans les pages du Journal de Tintin. Mais son créateur, Jean Graton, y travaille déjà depuis plusieurs années, signant notamment des histoires courtes consacrées au sport automobile. Dans cet album, intitulé Michel avant Vaillant de la série Michel Vaillant Histoires courtes, on retrouve treize de ces histoires publiées entre 1954 et 1964 qui préfigurent selon l’éditeur ce que seront les aventures de Michel Vaillant. Bugatti, Fangio, Dunlop, Ascari ou encore Nuvolari, on y retrouve les grands noms qui ont fait la compétition automobile du XXᵉ siècle. Un recueil de fac-similés tirés directement du journal Tintin. (Michel avant Vaillant, Histoires courtes tome 4, de Jean Graton. Graton. 15,50€)

Et si votre truc à vous, c’est plutôt la moto, don’t move, j’ai ce qu’il vous faut ! Julie Wood, l’autre grand personnage de Jean Graton, qui a vécu des aventures en solo avant d’être intégrée dans l’univers Michel Vaillant, a repris elle-aussi du service dans une deuxième saison. Au menu, un sérieux lifting graphique et un reboot scénaristique qui nous permet de la retrouver à l’âge de 18 ans dans notre monde actuel. Avec en prime, une enquête sur la mort des parents de la jeune femme. Et qui signe le dessin ? Claudio Stassi, celui-là même qui a réalisé l’album Henri Vaillant. (Mortel rodéo, Julie Wood (saison 2), de Pelaez et Stassi. 15,50€)

Eric Guillaud

24 Oct

Etienne Davodeau signe une BD sur l’accompagnement des personnes atteintes d’Alzheimer

Entre fiction et réalité, l’auteur angevin Étienne Davodeau s’est imposé comme une voix singulière dans le paysage du neuvième art. Il revient aujourd’hui avec Là où tu vas, un récit mettant en lumière le métier de sa compagne, Françoise Roy, accompagnatrice au quotidien des personnes atteintes de troubles cognitifs.

Étienne Davodeau © Chloé Vollmer-Lo

Depuis son village angevin, Étienne Davodeau a écrit et dessiné une bonne quarantaine de bandes dessinées essentielles, tantôt des fictions, tantôt des documentaires, dans les deux cas, des récits sensibles et profondément humains, où il explore sans relâche le réel, le quotidien et l’intime.

Avec toujours ce souci de la proximité ! Dans Rural !, sa première bande dessinée documentaire, Étienne Davodeau mettait en scène des agriculteurs angevins confrontés à la construction d’une autoroute. Dans Les Mauvaises Gens, il revenait sur le passé militant de ses parents. Dans Les Ignorants, il racontait une initiation croisée avec un voisin viticulteur. Enfin — mais les exemples pourraient se multiplier — Loire offrait un voyage au cœur des sentiments humains et de la nature qui l’entoure.

Cette fois, son regard s’est posé sur une personne encore plus proche, celle avec qui il partage sa vie depuis quarante ans, sa compagne, Françoise Roy, dont le métier est d’accompagner les personnes atteintes de troubles cognitifs, Alzheimer et autres. Inlassablement, pendant quinze ans, il lui a proposé de réaliser une bande dessinée sur son travail. Inlassablement, elle a refusé. Jusqu’à ce qu’elle accepte, estimant qu’il était temps de porter à la connaissance de tous la réalité de ce métier invisible, fait de patience, d’écoute et d’humanité. Interview…

La suite ici

22 Oct

Deryn Du, un grand frisson poétique signé Guillaume Sorel

Si son univers graphique avait surpris plus d’un à ses débuts, force est de constater que le temps n’a en rien émoussé le talent de Guillaume Sorel, qui est de retour en ce mois d’octobre avec Deryn Du, un récit à donner la chair de poule… ou de corbeau.

Le ciel est bleu, la mer est calme, et le village, blotti le long de la côte galloise entre le port et les collines, semble être gagné par la torpeur de l’été. Tout paraîtrait paisible, presque figé, s’il n’y avait pas cet attroupement sur la plage : une baleine échouée. Immense. Nauséabonde. Son corps porte les marques de morsures. Des requins ? Visiblement non. Mais alors… quoi d’autre ?

Ce drame n’est que le premier d’une longue série. En l’espace de deux semaines, plusieurs meurtres atroces ont été commis : un homme retrouvé broyé par une créature inconnue, un autre empoisonné par des araignées, et plus troublant encore, un couple piétiné dans son lit par des chevaux.

Un tueur fou ? Une force surnaturelle ? Le village s’inquiète, la police enquête… Et au cœur de cette agitation, une jeune fille aussi mystérieuse qu’insaisissable. Elle s’appelle Deryn…

© Dupuis / Sorel

Impossible de ne pas tomber sous le charme du graphisme de Guillaume Sorel qui, depuis sa première série L’Île des morts — publiée entre 1991 et 1996 aux éditions Vents d’Ouest et régulièrement rééditée en intégrale — nous transporte dans un univers à la fois envoûtant et fantastique.

Impossible de ne pas succomber au charme du graphisme de Guillaume Sorel qui, depuis sa première série L’Île des morts— publiée entre 1991 et 1996 aux éditions Vents d’Ouest et régulièrement rééditée en intégrale — nous transporte dans un univers à la fois envoûtant et fantastique.

© Dupuis / Sorel

Cette fois, l’auteur s’est lancé dans une réflexion partagée avec quelques amis du neuvième art : comment faire peur en bande dessinée ? Une vaste question, tant la peur demeure sans doute l’émotion la plus difficile à faire passer dans ce médium.

Pour y parvenir, Guillaume Sorel a joué sur les angles de vue, les cadrages, tout en rejetant les ambiances nocturnes et glauques. « Dans Deryn Du… » , explique-t-il, « c’est l’été, les blés sont mûrs, la mer est belle et calme. Il fait jour presque tout le temps. L’idée était d’amener une atmosphère étrange dans un lieu à priori pas du tout inquiétant. »

© Dupuis / Sorel

À défaut d’avoir cette peur incontrôlable que l’on peut ressentir devant un film d’horreur, le lecteur se retrouve plongé dans une ambiance inquiétante, c’est une angoisse plus subtile, plus poétique, qui s’installe au fil des pages. Somptueux !

Eric Guillaud

Deryn Du, de Guillaume Sorel. Dupuis. 25€

12 Oct

Bernie Wrightson dans les magazines Eerie et Creepy, une alliance diabolique

Après ses nombreuses rééditions des œuvres maîtresses de Richard Corben et ses deux volumes consacrés à Vampirella (à quand la suite ?), l’éditeur français Delirium s’attaque ici à un autre monument de la bande dessinée underground d’horreur, Bernie Wrightson, dont il réédite un volume sorti une première fois en 2014. Et c’est toujours aussi envoûtant!

Si après des années de disette, la bande dessinée d’horreur a repris du poil de la bête dans les 70s, c’est notamment grâce à des publications désormais cultes comme Eerie et Creepy qui osaient aller plus loin que les trop timides Marvel ou DC Comics et à des dessinateurs, pardon des artistes, comme Bernie Wrightson. Malgré son physique de nerd introverti et son décès en 2017, il continue d’être pour toute une communauté comme une sorte de totem indétrônable, continuant d’exercer une influence majeure. Et lorsqu’on feuillette les pages de ce volume réunissant toutes les histoires auxquelles il a contribué ou qu’il a dessinées pour Eerie et Creepy entre 1974 et 1977, on se souvient pourquoi.

Oui, la récolte pourrait paraître un peu chiche, avec ‘seulement’ douze histoires, dont deux où il n’a réalisé que l’encrage. Mais chacune d’entre elles est un petit chef-d’œuvre d’orfèvrerie. D’ailleurs, par rapport à la première édition de 2014, en plus d’une autre couverture, cette nouvelle version contient un bonus non négligeable : le story-board et le texte complet de l’un des plus beaux récits du livre (Le Monstre De Boue), fascinante plongée dans la méthode de travail du maître qui ne négligeait aucun détail.

© Delirium / Wrightson

Ce n’est pas pour rien que Wrightson a été marqué par le film déviant Freaks de Tod Browning et travaillé pendant des années à illustrer le Frankenstein de Mary Shelley. L’homme a toujours été fasciné par le contraste entre beauté saisissante et horreur absolue. Majoritairement serties dans un noir et blanc d’une finesse incroyable (à part, justement, Le Monstre De Boue), toutes ces histoires excellent donc à faire du macabre un spectacle à la fois cruel et envoûtant. De nombreuses planches sont quasiment sans dialogue, tout juste racontées par un monologue intérieur assez concis, toutes les émotions des personnages étant dépeintes sur des visages contorsionnés baignant souvent dans un clair-obscur frappant.

© Delirium / Wrightson

À l’instar de son collègue Richard Corben, il illustre ici la célèbre nouvelle d’Edgar Allan Poe Le Chat Noir comme s’il l’avait écrite lui-même alors que pour la terrifiante Jenifer, scénarisée par son ami Bruce Jones qui signe également l’introduction de ce livre, il renouvelle complètement le concept de l’emprise avec une subtile perversité. Mieux : comme le prouve la galerie des nombreuses couvertures réalisées pour les deux revues et mettant en scène leurs mascottes respectives, Wrightson savait aussi faire preuve d’un humour très noir.

Bref, embelli par le travail de reproduction comme d’habitude impeccable avec cet éditeur aux goûts sûrs, voici ce que l’on appelle dans les milieux autorisés un indispensable, autant pour les fans de Bernie Wrightson que pour les fans de bandes dessinées d’horreur des années 70. Indispensable, on vous dit !

Olivier Badin

Eerie & Creepy présentent Bernie Wrightson. Delirium. 25€

11 Oct

De The Nice House on the Lake à Derrière la porte : James Tynion IV n’a pas fini de nous hanter

James Tynion IV, l’auteur de la série à succès The Nice House on the Lake, revient avec un nouveau récit dont le titre à lui-seul suffit à nous donner des frissons, une histoire d’épouvante à lire jusqu’au bout de la nuit…

Mais qu’est-ce qui peut bien se cacher derrière la porte du placard de sa chambre ? Un monstre ? Jamie en est persuadé. Chaque soir, il s’endort le ventre noué par l’angoisse, et chaque nuit, il se réveille en hurlant. Maudit placard ! Mais bientôt, il en sera débarrassé pour de bon. Toute la petite famille quitte New York pour Portland : un vrai changement de vie, près de 3000 miles à avaler. Thom, le père, a décidé de faire la route en voiture avec son fils, histoire de bien mesurer la distance qu’ils vont mettre entre eux et ce fichu monstre. Hélas, rien n’y fait, le monstre leur colle aux baskets. Et s’il n’y avait que ça ! Entre Thom et Maggie, sa compagne, ce n’est plus la même histoire. Et ce déménagement, censé marquer un nouveau départ, pourrait bien tout faire basculer…

The Department of Truth, The Deviant, Spectrograph, et surtout The Nice House on the Lake, qui lui a valu l’Eisner de la meilleure nouvelle série en 2022, celui du meilleur scénariste en 2023, ainsi que le Prix de la série au Festival d’Angoulême en 2024… James Tynion IV s’impose comme l’un des auteurs majeurs de la bande dessinée américaine contemporaine. Il s’associe ici au dessinateur Gavin Fullerton, dont le trait confère au récit toute sa puissance et sa dimension horrifique. Un magnifique album accompagné d’un cahier de croquis et d’une galerie de couvertures alternatives.

Eric Guillaud 

Derrière la porte, de James Tynion IV et Gavin Fullerton. Urban Comics. 20,50€

© Urban / Tynion IV & Fullerton